Le premier président de gauche de l’histoire du Sri Lanka, Anura Kumara Dissanayaka, a été investi lundi 23 septembre en promettant de « faire de son mieux » pour relever le pays, deux ans après la crise économique qui a imposé à sa population une cure d’austérité brutale.À 55 ans, Anura Kumara Dissanayaka a pris dans les urnes le pouvoir que son parti marxiste n’avait pu arracher par les armes lors de deux insurrections meurtrières.This morning (23rd), I took oath as the 9th Executive President of the Democratic Socialist Republic of Sri Lanka in the presence of Chief Justice Jayantha Jayasuriya at the Presidential Secretariat.I promise to fulfill your responsibility to usher in a new era of Renaissance… pic.twitter.com/TFJuyh9SbC— Anura Kumara Dissanayake (@anuradisanayake) September 23, 2024Admirateur de Che Guevara et de Fidel Castro, le chef de la coalition de gauche a été proclamé vainqueur avec 42,3 % des suffrages, devant le chef de l’opposition au Parlement Ranil Sajith Premadasa et le président sortant Ranil Wickremesinghe.En votant samedi, il s’était montré très confiant. « Je pense que cette élection marquera le plus grand tournant de l’histoire du Sri Lanka », a-t-il déclaré, tout sourire.« un gouvernement du peuple »Tout au long de sa campagne, « AKD », comme le surnomment ses troupes, a martelé un message de défiance des élites politiques « corrompues » du pays, à ses yeux coupables de sa faillite financière en 2022.Au fil des semaines, ce discours a convaincu un nombre croissant de Sri Lankais.Avant même l’officialisation de sa victoire, il a fait savoir qu’il ne « déchirerait pas » l’accord signé en 2023 avec le Fonds monétaire international (FMI) mais confirmé qu’il en renégocierait certaines clauses.« Pour la première fois au Sri Lanka, le pouvoir va passer des mains d’une poignée de familles privilégiées et corrompues à un gouvernement du peuple », a promis AKD dans son programme électoral.Une proclamation qui résume l’ambition de ce fils d’agriculteur, entièrement formé à l’école marxiste du Front de libération du peuple (JVP). Alors communiste convaincu, il a confié que ses héros de jeunesse avaient pour nom Marx, Lénine et Engels, ainsi que Fidel Castro ou Che Guevara, dont les portraits décorent d’ailleurs toujours son bureau.Un marxiste converti à l’économie de marchéEn 1971, le JVP a déclenché dans l’île une première insurrection meurtrière contre le pouvoir, vite réprimée au prix de 20 000 victimes. Seize ans plus tard, le parti a repris les armes après une loi de décentralisation qui accordait des pouvoirs à la minorité tamoule de l’île.Issu de la majorité cinghalaise, Anura Kumara Dissanayaka se fait remarquer en prenant la tête des étudiants du JVP. Récemment, il a raconté avoir échappé, caché par un de ses professeurs, aux escadrons de la mort qui traquaient les responsables de la guérilla. Cette révolte s’achève en 1989, après avoir fait jusqu’à 60 000 morts selon certaines estimations.Lorsqu’il prend la tête du JVP en 2014, Anura Kumara Dissanayaka tire un trait sur le passé et renonce à la lutte armée. « Nous assurons au peuple du Sri Lanka que nous ne reprendrons jamais les armes », déclare-t-il.Pour marquer sa rupture avec le passé meurtrier de son mouvement et élargir sa base populaire, il forme alors une coalition avec d’autres partis de gauche, le Pouvoir national du peuple (NPP). Lui-même s’est largement converti à l’économie de marché, assurant qu’il n’était pas hostile à l’idée de privatiser certaines entreprises publiques.Récemment encore, il a raillé une « campagne de diffamation » dirigée contre son parti « qui dit que nous allons tout nationaliser, même les vaches »…La colère de la populationSes premiers pas électoraux sont modestes. Lors de la présidentielle de 2019, il ne récolte que 3 % des voix. Il ne fait guère mieux un an plus tard aux législatives, où le JVP ne prend que… 3 sièges. Mais depuis la crise financière catastrophique de 2022, AKD et sa coalition ont le vent en poupe.Même s’il ne s’implique pas directement dans les manifestations contre l’inflation et les pénuries qui provoquent la chute du président Gotabaya Rajapaksa, son parti surfe sur la colère de la population.Proche de la Chine par conviction, Anura Kumara Dissanayaka s’est aussi rapproché de son grand voisin du nord, l’Inde. « Je peux assurer que le territoire du Sri Lanka ne sera utilisé contre aucune autre nation », a assuré un dirigeant de son parti, Bimal Ratnayake.
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Anura Kumara Dissanayaka, un admirateur de Che Guevara, à la tête du pays
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