Des Afghanes font frire de traditionnels gâteaux dans une boulangerie de Kaboul, le 5 mai 2024. SAYED HASSIB / REUTERS Six jours seulement après avoir célébré leur troisième anniversaire au pouvoir, les talibans ont imposé de nouvelles restrictions aux femmes afghanes, leur interdisant de chanter, de réciter de la poésie et même de lire à voix haute en public. Un nouveau palier dans la volonté de la République islamique d’Afghanistan de museler la parole des femmes, déjà réduite au silence depuis le retour des fondamentalistes, le 15 août 2021. Parmi les nouvelles mesures détaillées dans l’article 13 de la loi « pour la prévention du vice et la promotion de la vertu », qui concerne les règles applicables aux femmes, il leur est imposé de se voiler entièrement le corps en public, en couvrant leur visage pour éviter de « tenter » les hommes. Leurs vêtements ne doivent être « ni fins, ni serrés, ni courts ». Les femmes sont désormais contraintes de se couvrir même devant des hommes et des femmes non musulmans pour éviter la « corruption ». Elles n’ont par ailleurs plus le droit de se parfumer ou de se maquiller. Les Afghanes ne sont plus autorisées à regarder les hommes avec lesquels elles ne sont pas liées par le sang ou le mariage – et vice versa – , ni à se déplacer sans un mahram (un homme de leur famille). Jusqu’à présent, elles pouvaient s’éloigner jusqu’à 70 kilomètres de leur domicile sans être accompagnées, même si elles étaient fréquemment contrôlées. En mai 2022, les talibans avaient « demandé » aux femmes de rester chez elles, « sauf en cas de nécessité ». Comme chaque soir, Sonia (le prénom a été modifié) regardait la télévision dans son appartement situé dans un quartier résidentiel de Kaboul quand elle a appris la promulgation de cette nouvelle loi. « Ma fille de 3 ans dormait dans mes bras. Je l’ai longtemps regardée et je me suis effondrée. Je n’ai pas pu pleurer ni hurler. Les talibans m’ont déjà tout volé, mais cette fois, ils veulent nous étouffer jusqu’à la mort », se désole cette femme de 47 ans. Aujourd’hui sans travail, elle se demande quel avenir elle va pouvoir offrir à ses deux petites filles face à l’acharnement des talibans. « Elles ne pourront pas aller à l’école après l’âge de 12 ans et je refuse de les marier avant leur majorité. Elles n’ont aucun avenir ici », se désespère-t-elle avant de condamner le silence de la communauté internationale face aux violations des droits humains perpétrées par les talibans. Conformité avec la charia Enoncées dans un document qui comporte pas moins de 114 pages et 35 articles, ces mesures constituent parmi les restrictions les plus sévères imposées aux femmes afghanes depuis le retour au pouvoir des talibans. Officiellement promulguée après avoir été ratifiée, mercredi 21 août, par l’invisible chef suprême Haibatullah Akhundzada, cette loi marque une étape importante dans l’institutionnalisation de l’interprétation talibane de la loi islamique par le ministère de la promotion de la vertu et de la prévention du vice. D’après Mélissa Cornet, chercheuse sur les questions de droits humains, établie à Kaboul depuis janvier 2018, « la communauté internationale a fait des droits des femmes son cheval de bataille, ce qui rend difficile pour les talibans de faire des avancées sur cette thématique sans que cela ne soit perçu comme une défaite. Pour autant, les talibans obtiennent peu à peu une reconnaissance diplomatique de fait de la communauté internationale sans avoir à faire de concessions ». Il vous reste 46.31% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
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Les talibans interdisent aux Afghanes de chanter, de lire en public et de se déplacer seules
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