Le sort des 120 000 Arméniens du Haut-Karabakh, acculés à la défaite militaire et à la perte de toute souveraineté, réduits à des « séparatistes », des « terroristes », par l’ennemi azerbaïdjanais qui a attaqué une nouvelle fois, lundi 18 septembre, renvoie aux pires événements du siècle dernier. Et accroît toutes les inquiétudes des démocrates sur la prévention et la répression du crime de génocide, alors que seront commémorés les 75 ans de la Convention des Nations unies, adoptée le 9 décembre 1948 à Paris. Lire aussi la tribune : Article réservé à nos abonnés « Le Haut-Karabakh arménien, qui représente ce que nous prétendons incarner, mérite mieux qu’un regard oublieux » Pourquoi mentionner un crime de génocide alors que le conflit au Caucase paraît essentiellement territorial ? Il l’est à première vue. Mais s’y loge un risque d’extermination de la population du Haut-Karabakh et de destruction d’une terre arménienne sous couvert d’une opération de reconquête. Il s’agit d’en informer la conscience publique. Le Haut-Karabakh, que le régime du président Aliev ramène de force dans la « mère patrie », est une enclave de peuplement intégralement arménien, rattachée à ce pays turco-musulman par Staline en 1921. Avec l’effondrement du bloc soviétique, les Arméniens d’Azerbaïdjan, victimes de pogroms de plus en plus sanglants commis par les nationalistes azéris, proclament l’indépendance du Haut-Karabakh en 1991. Menacée de destruction, la petite République reçoit le soutien militaire de la République d’Arménie, qui s’est elle aussi libérée du joug soviétique. Contre toute attente, elle repousse les assauts militaires et s’empare de territoires azerbaïdjanais. L’Artsakh, nouveau nom arménien du Haut-Karabakh, bénéficie alors, de 1994 à 2020, d’une continuité territoriale avec la République d’Arménie, forgeant des frontières nouvelles, comme en Europe avec l’ex-Yougoslavie – cette dernière transformée par les volontés d’indépendance auxquelles répond le nettoyage ethnique contre les civils. Situation hautement périlleuse Les prétentions territoriales de l’Azerbaïdjan postsoviétique sur le Haut-Karabakh sont donc très contestables, même si, prudemment, aucune nation n’a consenti à reconnaître la République d’Artsakh après 1991. Durant ces trois décennies, la Russie a imposé un statu quo plutôt favorable aux Arméniens qui, de doute façon, n’avaient pas le choix de leurs protecteurs, puisque sans soutien international (sinon celui de la France avec des moyens d’action toutefois limités). Ces trois décennies s’achèvent brutalement le 27 septembre 2020 avec l’offensive générale de l’Azerbaïdjan et de la Turquie. Une guerre de quarante-quatre jours ne se limite pas pour les assaillants à reconquérir les territoires azerbaïdjanais perdus en 1994. Trois districts arméniens du Haut-Karabakh sont saisis et l’enclave est isolée de la République d’Arménie par un couloir, celui de Latchine, en théorie sous protection de la Russie, dont l’intervention impose le cessez-le-feu du 9 novembre 2020. Il vous reste 60% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
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