Le sommet du G20 en Inde, qui s’est achevé dimanche 10 septembre, a été une bonne affaire pour son organisateur. Le premier ministre, Narendra Modi, avait obtenu en 2022 de l’Indonésie que celle-ci prenne son tour pour lui permettre de mettre en scène ce rassemblement de prestige au plus près des élections générales prévues en 2024. Il en a fait, et en fera certainement bon usage en jouant sur la fierté nationale. Lire aussi : Article réservé à nos abonnés L’Inde, cinquième puissance mondiale aux pieds d’argile Ce succès personnel incontestable, en dépit de l’absence des présidents chinois et russe, masque mal, en revanche, la déception nourrie par le communiqué final, point d’équilibre d’un monde que le G20 représente en partie. Cette déception est manifeste au chapitre de l’Ukraine. La guerre d’agression conduite par la Russie depuis février 2022 n’a eu droit qu’à un passage laconique, nettement en retrait par rapport au communiqué obtenu lors du sommet précédent du G20, à Bali. La simple mention du fauteur de guerre a disparu, tout comme la moindre condamnation de ses actes. Moscou sera certainement impressionné par l’invitation générale à respecter « l’intégrité et la souveraineté territoriales » des Etats. Ses actions, depuis des années, le montrent. Au moins l’absence de Vladimir Poutine en Inde a épargné au G20 une image embarrassante, celle qui aurait montré le maître de Moscou au mémorial dédié au père de l’indépendance indienne, le Mahatma Gandhi, apôtre de la non-violence. Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Au G20 de New Delhi, les pays émergents s’imposent face aux alliés de l’Ukraine Le président du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, a manifesté à cette occasion son inconsistance. Il a dit toute l’admiration que lui avait inspirée le mode de combat politique embrassé par ce héros indien tout en s’empressant d’inviter avec effusion à l’édition 2024 du G20 prévue dans son pays celui qui a semé la mort et la désolation sur le sol européen. La déception est tout aussi grande en matière de lutte contre le dérèglement du climat. Alors que ce dernier est attesté par une succession dévastatrice de drames climatiques, le communiqué final s’est gardé de mentionner l’objectif de sortie des énergies fossiles. Les scientifiques le considèrent pourtant comme la seule réponse capable d’inverser une courbe destructrice. Posture attentiste ou accommodante Sur ces deux crises, autour desquelles s’articulent une bonne partie des malheurs actuels du monde, le G20 a donc fait preuve d’une pusillanimité regrettable. Elle l’est d’autant plus qu’elle intervient alors que les Nations unies sont plongées dans une paralysie décourageante. Au point que leur Assemblée générale annuelle sera boudée par de nombreux chefs d’Etat et de gouvernement, dont ceux de quatre des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, la Chine, la France, le Royaume-Uni et la Russie. Le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, qui s’est bruyamment félicité du succès obtenu avec ce communiqué aboulique, a vanté l’union en Inde des membres du G20 « qui représentent le Sud global ». De fait, l’Ukraine a pu mesurer la vanité des efforts diplomatiques engagés au cours des derniers mois pour tirer une bonne partie de ces pays d’une posture attentiste ou accommodante qui fait le jeu de Moscou. Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Le G20, un sommet toujours profondément divisé au sujet de la guerre en Ukraine Que le Sud global doive être mieux pris en compte est une évidence à laquelle les tenants de l’ordre mis en place après la seconde guerre mondiale sont restés trop longtemps sourds. Le comble serait pourtant que les pays qui le composent apparaissent en nouveaux agents de l’immobilisme, alors que le monde est menacé de fragmentation. Le Monde
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