Les responsables du gouvernement taliban arrivent pour la deuxième phase d’inauguration du projet de canal Qosh Tepa à Hairatan, dans la province de Balkh, le 11 octobre 2023. ATIF ARYAN / AFP Mis au ban de la plupart des diplomaties pour ses atteintes aux droits humains, en particulier envers les femmes, le régime taliban n’a, depuis sa prise de pouvoir en 2021, jamais reçu de premier ministre. La venue du chef du gouvernement ouzbek, Abdulla Oripov, à Kaboul, le 18 août, où il a été reçu par son homologue taliban Mawlavi Abdul Kabir, constitue donc un événement pour ce régime qu’aucun Etat ne reconnaît. Les deux parties ont conclu quelque trente-cinq protocoles d’accords commerciaux et d’investissement d’une valeur de 2,5 milliards de dollars (2,3 milliards d’euros), affichant l’ambition de porter à l’avenir leur chiffre d’affaires à 3 milliards de dollars. Cette visite n’a cependant pas suscité de grande surprise sur la scène internationale, tant les relations entre l’Afghanistan et l’Ouzbékistan sont anciennes et ont continué de se développer après l’arrivée au pouvoir des talibans. Pour Tachkent, seul le renforcement de des relations commerciales peut ouvrir à une « normalisation » des échanges avec l’Afghanistan. Une posture qui permet par ailleurs à l’Ouzbékistan d’être davantage reconnu par les Occidentaux, désireux de changements structurels en Afghanistan. En échange de tapis, de fruits et de boissons gazeuses, l’Afghanistan, l’un des pays les plus pauvres au monde, qui traverse une crise économique et sociale sans précédent, importe du carburant, des produits céréaliers, des matériaux de construction et de l’électricité d’Asie centrale, dont l’Ouzbékistan est la principale porte d’entrée. Lire aussi | Article réservé à nos abonnés L’Afghanistan vit sous perfusion financière américaine Ajouter à vos sélections « Tachkent privilégie l’influence économique aux relations diplomatiques formelles, selon l’expert Hamza Boltaïev, directeur du Centre d’études sur l’Afghanistan et l’Asie du Sud à l’Institut des hautes études internationales, basé à Tachkent. Le but est de créer un levier économique pour pousser le pays à favoriser les discussions régionales et une diplomatie plus compréhensive. » Mais amener petit à petit les talibans à des changements structurels, tant dans la politique intérieure qu’extérieure, par une dépendance commerciale est un calcul qui peine à trouver ses fruits. « Gifle diplomatique » Car les tensions subsistent, surtout au sujet du partage de l’eau. L’Ouzbékistan n’a pas pu empêcher la construction, au printemps 2023, du canal de Qosh Tepa, dans la province de Balkh, dans le nord de l’Afghanistan, par lequel un cinquième du volume du fleuve Amou-Daria est détourné. En aval de ce fleuve, l’Ouzbékistan et le Turkménistan souffrent de cette baisse du niveau d’eau, qui affecte gravement l’irrigation de leurs terres agricoles. « Ce canal a été une vraie gifle aux efforts des diplomates ouzbeks avec les talibans, explique Jennifer Murtazashvili, directrice du Centre pour la gouvernance et les marchés et professeur d’affaires internationales à l’université de Pittsburgh. Il montre que les talibans font passer leurs intérêts à court terme avant les relations à long terme avec leurs voisins. » Il vous reste 54.3% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
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Les pays d’Asie centrale retrouvent des relations commerciales avec l’Afghanistan
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