La pathétique fin de règne de la première ministre du Bangladesh Sheikh Hasina, forcée de fuir précipitamment son pays, début août, pour échapper à une foule déchaînée menaçant de la lyncher en son palais, est une mauvaise nouvelle pour l’Inde. Le nouveau gouvernement bangladais par intérim, dirigé par le Prix Nobel de la paix 2006, Muhammad Yunus, est notoirement très remonté contre son grand voisin, accusé d’avoir soutenu pendant de trop longues années cette « bégum de fer » qui a fait évoluer au fil des années son régime vers une sinistre « démocrature ». Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Sheikh Hasina, une hôte encombrante pour l’Inde Ajouter à vos sélections Plus largement, cet épisode illustre les changements en cours dans le champ géopolitique de l’Asie du Sud, une évolution qui force New Delhi à s’adapter à de nouvelles contraintes et à réviser le modus operandi de sa politique étrangère. Plus que jamais, l’Inde semble être non seulement entourée d’ennemis (Chine et Pakistan), mais aussi d’autres voisins infiniment moins belliqueux et cependant soucieux d’échapper à sa tutelle, ou au minimum enclins à négocier les conditions de son « aide bienveillante »… Une évolution d’autant plus préoccupante pour la République de l’Inde que ce changement de paradigme est apparu ces dernières années sur fond de compétition régionale entre New Delhi et Pékin. La chute de Mme Hasina risque ainsi d’avoir une conséquence quasi mécanique : donner un avantage à la Chine s’il s’avérait que le nouveau pouvoir bangladais choisisse de rééquilibrer la politique étrangère du pays dans une direction moins favorable à New Delhi. Bataille au sommet « La relation de grande proximité dont [l’Inde] jouissait avec [le Bangladesh] durant le mandat d’Hasina fait désormais face à un risque considérable, confirmait en août le politologue Sumit Ganguly dans la revue Foreign Policy. L’Inde s’inquiète tout particulièrement de l’éventualité qu’un gouvernement [bangladais] ne se tourne vers la Chine. » Le Bangladesh n’incarne pas la seule difficulté à laquelle sont en ce moment confrontés les stratèges du gouvernement du premier ministre indien, Narendra Modi. La chute de sa précieuse alliée Sheikh Hasina vient de s’ajouter à des revers essuyés ces derniers mois par la « Big Mother » de l’Asie méridionale. En moins d’un an, des leaders plutôt hostiles à l’Inde sont arrivés au pouvoir dans deux pays dont la position géographique la concerne au plus près : d’abord aux Maldives, ce petit archipel du sud de l’océan Indien que New Delhi considère comme appartenant à sa « chasse gardée » ; puis au Népal, cette république himalayenne dont le septentrion borde le Tibet chinois. Il vous reste 55.27% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
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