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Le « printemps » bangladais face à une répression brutale

by News7
Le « printemps » bangladais face à une répression brutale



« C’est un carnage », souffle Jahanara, 23 ans, ébranlée face aux informations qui parviennent au compte-gouttes du Bangladesh. Ce mardi soir, place de la Bastille à Paris, plusieurs dizaines de ses compatriotes se sont rassemblés en solidarité au mouvement étudiant brutalement réprimé par le régime de la première ministre, Sheikh Hasina. Certains partagent des vidéos qui filtrent de leur pays, coupé du monde durant cinq jours par un couvre-feu et une suspension des communications. Sur les écrans se dessinent des silhouettes s’affaissant sous les tirs ciblés de forces de l’ordre, des cohortes de blessés arrivant à l’hôpital de Dacca, ou encore un hélicoptère sillonnant le ciel pour tirer sur des individus. « Sheikh Hasina est une meurtrière, lâche Jahanara. Comment l’armée peut-elle être ainsi utilisée contre des étudiants pacifiques? »Chape de silence et d’impunitéD’après les décomptes partiels de la presse locale, entre 150 et 200 Bangladais ont été tués durant les troubles, des chiffres à revoir à la hausse, d’après les leaders étudiants. La coupure des communications a plongé les 170 millions d’habitants dans une chape de silence et d’impunité. La police a procédé à plus de 2 500 arrestations. Et si un semblant de normalité est revenu mercredi, les tensions restent vives. Le Bangladesh vient de vivre les plus graves violences connues sous le régime de Sheikh Hasina, au pouvoir depuis quinze ans.La contestation a commencé au début du mois, en opposition à des quotas réservant des emplois au sein de la fonction publique. Forgée par une colère sourde, la fronde étudiante s’est élargie à une dénonciation de la culture de l’Awami League, le puissant parti de Sheikh Hasina. La situation a dégénéré lorsque son aile étudiante, la Chhatra League, a fait irruption dans les rues pour affronter les protestataires, bientôt suivie par le déploiement des forces de sécurité. « Démissionne, Sheikh Hasina ! Dictateur ! », ont crié les jeunes défiant le pouvoir.Voix critiques et dissidentesÀ 76 ans, Sheikh Hasina a été élue en janvier à la tête du Bangladesh pour un troisième mandat consécutif lors d’un scrutin entaché de soupçons de fraudes. Depuis quinze ans, elle mène une chasse impitoyable à ses opposants. Près de 20 000 d’entre eux avaient été arrêtés avant les élections. Par le passé, son régime a été accusé de perpétrer des exécutions extrajudiciaires et de réprimer violemment les dissidents.Réfugié en France, Pinaki Bhattacharya est l’un d’eux. Fort de près de deux millions d’abonnés sur sa chaîne YouTube, cet écrivain et activiste dénonce sans relâche la dérive autoritaire du Bangladesh. « Nous allons continuer la lutte ! », promet-il face aux Bangladais qui l’acclament, place de la Bastille, comme un héros.Jeunesse à boutÀ ses yeux, la jeunesse de son pays est à bout. « Cette génération d’étudiants n’a jamais connu d’élections libres, n’a pas le droit de s’exprimer, ni celui de se rassembler, et n’a pas de perspective d’embauche dans un système qui favorise les sympathisants du pouvoir. » Dans les universités, l’autoritarisme de la Chhatra League a suscité colère et frustration. « Cette génération veut lutter contre l’injustice, la corruption et la répression des libertés, approuve Jahanara. C’est notre” Mai 68”. »« Tant qu’elle bénéficie de l’appui de l’Inde, Sheikh Hasina devrait conserver le pouvoir, estime Pinaki Bhattacharya. Elle se projette en seule garante de laïcité au Bangladesh et diabolise ses opposants.» Ainsi, son gouvernement a déclaré lundi que l’un des étudiants tués était un « vendeur de drogue ». Les manifestants ont néanmoins arraché une victoire : dimanche, la Cour suprême a revu les quotas à la baisse, selon leurs vœux.Messages non lusÀ la faveur d’un calme précaire mercredi, les mécanismes de la répression se dévoilent. L’opposition accuse les autorités de cacher l’ampleur des massacres, alors qu’Amnesty International a déjà dénoncé un usage de « la force illégale ». Certains étudiants ont été torturés, comme le meneur Nahid Islam. D’autres ont disparu. Abdul Azim, 31 ans, est sans nouvelle de son frère, qui a protesté dans la ville de Sylhet : « Il a dû fuir, car la police cherchait les étudiants en porte à porte. » Sur les téléphones, des messages restent « non lus ». Il y a cinq jours, le dernier échange avec Nipa, étudiante à Dacca, s’est achevé sur un appel : « Informez le monde, nous avons besoin d’aide. »—–Une croissance en trompe l’oeilAvec une croissance robuste à plus de 6 %, le Bangladesh est porté par l’industrie du textile, qui représente 84 % des 51 milliards d’euros d’exportations annuels.Sur 171 millions d’habitants, 32 millions sont sans emploi ou sans formation, et 2 millions de personnes arrivent chaque année sur le marché du travail.Estimé à 2 688 dollars, le revenu annuel moyen par habitant a quadruplé en quinze ans. Le Bangladesh vise à devenir un pays développé en 2041, pour les 70 ans de son indépendance.La pauvreté, qui touchait 31,5 % de la population en 2010, a reculé, avec 18,7 % en 2022.La France mène un projet de vente de dix Airbus 350 au Bangladesh.



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