LETTRE DE TOKYO Les élèves du lycée international de Kyoto, lors de leur victoire en finale du championnat de base-ball des lycées japonais, au stade Koshien, à Nishinomiya, au Japon, le 23 août 2024. KYODO / VIA REUTERS Au pays du Soleil-Levant, chaque école a son blason, son drapeau et son hymne vantant le charme des saisons quand il n’exalte pas les valeurs éducatives. Parfois, ces textes suscitent des réactions mal venues. Ainsi celui du lycée international de Kyoto, à 450 kilomètres de Tokyo. Pour la frange nationaliste locale, ses paroles ont le tort d’être en coréen et de mentionner la « mer de l’Est » pour parler du bras de mer qui sépare la péninsule de l’Archipel. Les Japonais maintiennent qu’il faut utiliser le terme « mer du Japon ». L’affaire a éclaté après la victoire de l’établissement en finale, le 23 août, du tournoi de base-ball des lycées, le « koshien », contre l’établissement Kanto Daiichi de Tokyo au terme d’un match haletant conclu sur le score de 2 à 1. Le résultat a déclenché un flot d’attaques sur les réseaux sociaux avec des appels à « l’expulsion du lycée international de Kyoto de la Fédération de base-ball des lycées » ou la dénonciation d’une « honte pour Kyoto ». Le lycée international est un héritier du Kyoto Chosen, fondé en 1947 pour accueillir les enfants d’expatriés coréens. « Chosen » est l’ancien nom de la Corée. Dans les années 1990, confrontée à des difficultés financières et à une baisse du nombre d’élèves, l’école avait décidé de s’intégrer au système éducatif japonais. Soutenu par le ministère des affaires étrangères sud-coréen et l’Union des résidents coréens au Japon (Mindan), il a obtenu, en 2003, l’agrément du ministère de l’éducation et changé de nom pour devenir le « lycée international de Kyoto ». Désormais, 70 % de ses 159 élèves sont japonais. Or, au Japon, les quelque 600 000 Coréens descendent pour beaucoup de migrants fuyant la misère ou contraints par le régime militariste nippon pendant la colonisation (1910-1945), et tout ce qui est coréen reste la cible d’un racisme rampant. Lire aussi (2020) | Article réservé à nos abonnés La championne Naomi Osaka appelle le Japon à combattre le racisme Ajouter à vos sélections « Coréens, pendez-vous ! » La Zaitokukai, une association qui milite contre les privilèges spéciaux des Coréens du Japon fondée en 2006 par le nationaliste Makoto Sakurai, s’est illustrée dans les années 2010 en organisant des rassemblements à l’entrée du quartier de Shin-Okubo, à Tokyo, connu pour abriter une importante population coréenne. On pouvait y entendre hurler des slogans tels que « Tuez les Coréens ! » ou « Coréens, pendez-vous ! Buvez du poison ! Crevez ! » La gouverneure de Tokyo, Yuriko Koike, proche du Parti libéral-démocrate et réélue en juillet pour un troisième mandat, a, comme chaque année depuis son arrivée à la tête de la métropole en 2016, refusé, le 1er septembre, de rendre hommage aux Coréens – entre 2 900 et 6 600 selon les estimations – massacrés dans les jours qui suivirent le tremblement de terre du 1er septembre 1923. Dès le lendemain de la tragédie qui fit 105 000 morts à Tokyo et sa région, des rumeurs se répandaient prétendant que des migrants de Corée avaient empoisonné les puits, allumé des incendies et provoqué des émeutes. Il vous reste 47.62% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
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Au Japon, un hymne en coréen qui ne passe pas
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